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Manon des Sources; Notes sur le rire, Marcel Pagnol

TITRE: Manon des Sources suivi de Notes sur le rire
AUTEUR: Pagnol
EDITION: France Loisirs
NOMBRE DE PAGES: 346
DATE D' EDITION: 1988
GENRE: Roman/ Essai

RÉSUMÉ: 

Manon des Sources

La fille de Jean de Florette et sa femme habitent désormais avec Baptistine après la mort de ce dernier. Manon a maintenant quinze ans et est bergère. Tous évitent le contact des autres villageois.  Ugolin et le Papet ont racheté Les Romarins. Ugolin est le dernier des Soubeyran et Papet lui rappelle qu'il doit se marier et avoir des enfants. Mais Ugolin, qui a aperçu la jeune Manon, en est tombé amoureux. Cachée, Manon a découvert la vérité concernant le décès de son père en écoutant une conversation dans les collines: Ugolin et Papet ont caché la source en apprenant que quelqu'un avait acheté la bâtisse des Romarins sur laquelle ils avaient des vues, et que tous les villageois étaient au courant de ce fait. Manon refuse donc catégoriquement Ugolin, d'autant plus qu'elle est tombée amoureuse de l'instituteur Bernard Olivier. 

Un jour, elle découvre un petit lac souterrain qui alimente la fontaine du village et elle en bouche l'ouverture.  Au village, c'est rapidement la panique. Lors de la fête d'anniversaire de l'instituteur, plusieurs personnes accusent Ugolin et le Papet, dont Manon. Un témoin vient apporter du soutien à Manon. SPOILER: Ugolin se suicide. Manon et Bernard Oliver débouchent la source. Ils se marient et ont un enfant. Suite à une discussion, le Papet comprend que Jean de Florette était son fils. Il meurt peu de temps après avoir appris la nouvelle et décide de tout léguer à Manon. 

 

Notes sur le rire

Dans ce court essai, Pagnol s'intéresse au rire. Il ne cherche pas à savoir de quoi nous rions, mais pourquoi nous rions. Il se concentre sur les causes du rire. Pagnol reprend d'abord les notions  tenues pour certaines à propos du rire: c'est une caractéristique humaine et l'homme ne rit que de l'homme, ou d'un caractère humain. Il va tenter de les remettre en cause, tout comme l'idée que le rire est uniquement provoqué par la surprise. Il propose une définition du rire: 

- C'est un chant de triomphe, d'une supériorité momentanée

- Il existe deux sortes de rire:

          - Le vrai rire, le rire sain, tonique, reposant. "Je ris parce que je me sens supérieur à toi (ou à lui, ou au monde entier, ou à moi- même)." C'est le rire positif. 

          - Le rire dur, triste, du mépris, de la vengeance. "Je ris parce que tu es inférieur à moi. Je ne ris pas de ma supériorité, je ris de ton infériorité." C'est le rire négatif.

- Il existe des nuances entre ces deux rires et on retrouve aussi le rire complet qui associe  le rire positif et le rire négatif. 

Pagnol cherche ensuite des preuves. Il va s'intéresser aux expressions de la langue française comme "rira bien qui rira le dernier" ou "le rire désarme".

Il s'attache ensuite à lister les différentes sortes de supériorités. Pour provoquer le rire, il faut que l'on se rende compte de sa supériorité brusquement et qu'elle soit momentanée. Le rire trouve souvent sa source dans les fonctions naturelles (locomotion, respiration, digestion, reproduction): il développe longuement l'exemple du pétomane. Il revient sur la définition donnée par Bergson: "du mécanique plaquée sur du vivant". Elle confirme la théorie avancée par Pagnol parce qu'un "individu qui agit mécaniquement  devant moi se montre [...] inférieur à moi, et me rappelle ma supériorité la plus précieuse: la liberté, dont je doute quelquefois." (p. 329). Il avance ensuite la thèse que le rire est tonique, que le rire déclenche un orage nerveux déversant des globules rouges dans le sang, ce qui éloigne le "spleen" en quelque sorte. Il s'intéresse ensuite aux jeux de mots, aux bonnes histoires, aux acteurs qui rient en scène, au snob, à la foule, à l'indifférence, au rire négatif, au rire offensif, à Lemoine, Œdipe et Charlot. 

Dans la dernière partie, Pagnol avance la théorie que la pitié et la peur sont les ennemies du rire. 

EXTRAITS:

Manon des Sources

"Dès qu'il reçut la grande  nouvelle, Attilio n'hésita pas une seconde, et il vint d'Antibes pour diriger en personne les premiers travaux. Il arriva sur une étincelante  bicyclette à pétrole qui tirait des coups de fusil en traînant une longue écharpe de fumée bleue." P. 9

 

"Ainsi, la longue peine de son père, ses efforts héroïques de trois années, devenaient presque ridicules. ..

Le petit chasseur l'avait dit: "Il y en avait que ça faisait rigoler..." Ce n'était pas contre les forces aveugles de la nature, ou la cruauté du Destin qu'il s'était si longuement battu; mais contre la ruse et l'hypocrisie de paysans stupides, soutenus par le silence d'une coalition de misérables, dont l'âme était aussi crasseuse que les pieds. Ce n'était plus un héros vaincu mais la pitoyable victime d'une monstrueuse farce, un infirme qui avait usé ses forces pour l'amusement de tout un village..." P. 125

 

 

Notes sur le rire

"Après tant de philosophes et de moralistes, il est bien téméraire d'écrire un livret, si court soit- il, à propos du rire." P. 289, 1

 

"Toutefois, et malgré l'aveu de leur impuissance à nous donner la formule du rire, plusieurs philosophes nous ont proposé des explications qui ressemblent à des formules. 

Lucien Fabre, dans un ouvrage fort remarquable (Le Rire et les Rieurs, Gallimard, 1929), nous dit ceci: 

"La théorie de Bergson peut se réduire en somme à ceci: est comique tout ce qui nous donne, d'une part l'illusion de la vie; d'autre part, l'illusion d'un arrangement mécanique.

"La théorie de Mélinand est plus générale: est comique tout ce qui peut se ranger, d'une part, dans l'absurde; d'autre part, dans une catégorie familière. 

"La nôtre, enfin, est encore plus générale: est comique tout ce qui peut, d'une part, créer un désarroi; d'autre part, résoudre brusquement  et heureusement son désarroi. La théorie de Bergson se borne à donner, sans s'en rendre compte, les éléments d'une variété de ce désarroi dont elle n'a pas soupçonné l'existence. la théorie de Mélinand se borne à donner, dans les mêmes conditions, une variété des procédés de résolution de ce désarroi." 

[...] 

Il n'y a pas de source du comique dans la nature: la source du comique est dans le rieur." P.  291 & 293, 2

 

"On pourrait définir l'ami en disant : "C'est un homme qui peut rire de moi sans me fâcher." " P.  310, 5

 

"Le sourire est véritablement un sous- rire. 

Le sourire est l'expression à mi- voix d'une légère supériorité révélée, ou d'une grande supériorité déjà reconnue." P. 329, 6

 

"[...] c'est un fait que le théâtre comique nous réconforte, précisément parce qu'il nous propose des personnages conçus et présentés de façon à nous faire croire que nous leur sommes, à chaque instant, supérieurs. [...] Faire rire un être découragé, c'est-à-dire qui se croit inférieur à tous, et même à la vie, c'est lui rendre momentanément un sentiment de supériorité sur un autre individu, ou sur un groupe d'individus, et ce sentiment, provoqué par l'artifice de l'auteur ou du comédien, peut réamorcer en lui, tout au moins provisoirement, la source de la confiance et du courage." P. 331, 6

APPRÉCIATION PERSONNELLE: 

J'ai vraiment adoré Manon des Sources! J'ai aussi bien aimé Les Notes sur le Rire

L'essai est un peu construit en reprenant les tournures d'une dissertation: Pagnol utilise "on" et "nous"  et il annonce ses arguments de façon à nous rappeler cet exercice scolaire. On peut lui reprocher le fait que la plupart de ses exemples sont des exemples inventés, imaginés et qu'ils ne se basent que très peu sur des faits réels. Néanmoins, on peut retrouver la lecture du Rire de Bergson et d'autres essayistes à travers l'analyse de Pagnol. 

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